Ce midi, j'ai nettoyé ma vaisselle (je raconterai passionément tout à l'heure comment j'ai ouvert la porte de mon placard).
Oui c'est stupide de dire "faire la vaisselle", autant à ce moment là "faire ses fringues" pour s'habiller, ou encore "faire la chaine hi-fi" pour écouter de la musique. Voilà encore un dissuasif linguistique puissant pour faire fuir les élèves de français. Réservons plutôt cette expression aux gens qui se déguisent en ustensiles de cuisine à mardi gras.
J'en ai profité pour calculer des probabilités ballistiques de perforation corporelle par glissé-tombé de fourchette dans le pied. Les résultats sont étonnants. J'en ai ainsi immédiatement déduit la source de mon problème d'installation de MySQL 4, une sombre histoire de socket à tendance suicidaire. J'ai enchainé sur une métaphysique du comportement monogamme, centré sur l'impossibilité personnelle de gérer le porte-à-faux sentimental, sorte d'intro-déclinaison sur une fidélité sans failles. Je me souviens avoir rebondi avec une réflexion sur les soucis écologiques de l'île de Pâques, maugréant à l'encontre du prélèvement intensif de la flore par la population (et bien évidemment du surpâturage ovin, mais merde faut bien bouffer quoi).
Puis il y a eu l'Idée. Un truc qui n'aurait jamais dû m'être destiné, mais qui pourtant m'a frappé de plein fouet. Un échaffaudage théorique insensé, mêlant physique de pointe sur la diffusion des particules neutroniques, principes de gravité fondamentale au sein des noyaux fissibles, et axiomes informatiques d'identification électro-optique des muons. Le crâne en ébullition, les équations fusaient devant mes pupilles ultra-dilatées, je nageait dans un océan mathématique en perpétuelle reconstruction. Clair, limpide, je sentais grandir en moi la flamme qui a dû animer les grands cerveaux de ce siècle. Je pense à Ludwig Boltzmann, Mitchell Feigenbaum, et autre Luis Walter Alvarez !
Et soudain pouf. Plus rien. Plus rien du tout.
La fourchette retombe sur le carrelage, la douleur se tait, me laissant dans un désert de silence mental et de chagrin intellectuel. Le calme neuronal du blaireau de base. L'habitude, en somme.
Bon sang j'avais The Meaning of Life à bouts de bras ! La Vérité en poche ! L'Omniscience en vieux copain !
Alors depuis ce midi, j'erre dans l'appartement, me balançant sporadiquement à la gueule tout objet passant à ma portée. Plus c'est lourd, plus l'espoir est grand, mais rien n'y fait. Je suis couvert de bleus mais ma tête est vide.
Bah j'ai MySQL qui fonctionne :/